En deux semaines, je suis passée de "malade d'inquiétude" à "déterminée à avancer quoi qu'il arrive". Aujourd'hui, je me sens même confiante. Par ce témoignage, j'espère être un moteur et une inspiration pour les entrepreneur.e.s qui m'entourent.
Face aux discours économiques ultra-pessimistes qui circulent dans les médias, j'ai décidé de réagir. Ma façon à moi de résister, c'est de montrer qu'il est possible de (sur)vivre en tant que petite entreprise de services, même dans un contexte inédit et difficile.
Je partage avec vous mon cheminement d'entrepreneure, sous forme d'un "journal du confinement". Loin de moi l'idée de donner des leçons, chaque cas est tellement différent. Je veux juste témoigner que l'espoir est possible.
Plus que jamais, notre économie fonctionne en écosystème. Si nous sommes tous tétanisés par la peur et les nouvelles défaitistes, plus personne n'avance. J'espère de tout coeur que mon témoignage allumera une lueur d'espoir en vous et vous donnera la force de relever les défis qui nous attendent. Pour construire ensemble un monde plus respectueux des individus, des collectivités et surtout de la Terre.
Voici le récit de mon vécu au cours de ces deux premières semaines de confinement. La suite reste à écrire, avec vous j'espère.
Premiers signes avant-coureurs
- Une semaine avant le "lock-down", je découvre aux infos ce qui se passe en Italie : les gens sont enfermés chez eux. Choc énorme. Pour moi qui suis éprise de liberté, de grands espaces, de musées et surtout de contacts humains, le confinement est la pire des choses qui puisse m'arriver. Mais je n'imagine pas un instant que cela puisse arriver "chez nous"...
- Trois jours avant le "lock-down", mon ordinateur rend l'âme après 9 ans de bons et loyaux services. Je peux juste récupérer un disque dur et trois vis dans une enveloppe. Tout est en rupture de stock. Je n'ai plus d'outil de travail et devrai me débrouiller avec un mini-ordinateur de remplacement.
- Deux jours avant le lock-down, une cliente m'envoie un mail intitulé "URGENT!!!"... Mon sang se fige dans mes veines. Cette cliente était malade mais je lui avais mis la pression pour qu'elle n'annule pas notre réunion... et j'avais attrappé son refroidissement. J'imagine qu'elle a un diagnostic positif au COVID... Je me fais des films, elle avait juste fait une boulette sur son site...
- Un jour avant le "lock-down", je réalise que la situation est devenue intenable pour mon mari, agent de voyages indépendant avec deux employées à sa charge. A contrecoeur, il prend les mesures pour activer le chômage économique à partir de la semaine prochaine. Il reste seul à bord pour gérer les annulations, menaces, réclamations,... Il a un courage exemplaire.
Le week-end où tout bascule
- C'est vendredi 13 mars que je réalise que nous sommes au bord du basculement. Je vomis mes tripes, à jeun. Je ne peux pas "avaler" ce qui nous arrive, en particulier l'idée de rester confinée qui nous sera confirmée quelques jours plus tard.
- Mes deux aînés sont rentrés du kot. On est à 5 groupés autour du wifi, la moitié du temps en vidéoconférence. Il y a des câbles, des tasses et des restes de repas partout.
- Je m'inquiète pour ma maman, isolée, à haut risque et blessée à la main. Elle est formidable et se débrouille seule malgré son handicap. C'est elle qui m'encourage à tenir bon. Waouw, merci Maman !
- Je prends le week-end pour encaisser, seule, dans mon jardin. Samedi, je fais un grand feu. Dimanche, je mets les mains dans la terre et commence à préparer mon potager. Je sème des fèves. Le calme revient peu à peu en moi.
Déterminée à avancer, quoi qu'il arrive
- Lundi matin : Je cherche des pistes pour réorganiser mon travail, qui s'effectuait jusqu'alors à 100% à côté de mes clients ou face à un petit groupe en formation. Je découvre Zoom, Whereby et d'autres outils. Je passe la matinée à les tester avec des amis en télétravail.
- Lundi après-midi : Isabelle, ma première cliente à distance, a tout de suite accepté ma proposition de travailler par vidéoconférence. En 2 heures, son site est comme neuf. Grâce aux partages d'écran, c'est vraiment comme un travail "à quatre mains".
- Mardi matin : J'ai totalement oublié de remettre un appel d'offres que je voulais absolument remporter. Le commanditaire ne veut pas faire d'exception malgré les circonstances. Je suis triste, car j'aimais beaucoup travailler pour ce client.
- Mardi après-midi : juste avant le confinement, je pars avec ma petite dernière faire une grande balade dans le Condroz. La dernière avant longtemps... Le soir, mon fils retourne vivre seul dans son kot à Liège. C'est sage et courageux de sa part. Je lui en suis très reconnaissante même si je culpabilise un peu.
- Mercredi matin : Poussée par un client visionnaire, je teste des outils de formation à distance pour un petit groupe. Zoom s'avère le meilleur, encore une fois. Je prends l'abonnement payant et je réalise mon premier test de formation en ligne avec 5 participants. J'ai la tête comme un seau mais ça fonctionne plutôt bien.
La Vie en remet une couche...
- Mercredi matin : Réveil au son des marteaux-piqueurs. C'est Damas dans mon jardin. Mon cher jardin qui est la seule bulle d'oxygène qui me reste. L'endroit où je puise ma force. L'endroit où je transmets mon amour à la Terre.
- Pendant 3 jours, dès 7h30, nous vivons au son des pelles mécaniques : les voisins démolissent l'annexe de leur maison qui touche notre propriété. Le mur qui nous séparait s'écroule sur mon massif d'hellébores, sous mes yeux. Nous essayons de nous interposer, mais rien n'arrêtera leur machine destructrice.
- Vendredi soir : Le calme est enfin revenu. Le rouge-queue et le troglodyte cherchent leur nid, affolés. De nombreux oiseaux s'abritaient dans ces vieux murs de pierre couverts de lierre. Aujourd'hui ce n'est plus qu'un champ de ruines et mon bureau a une vue plongeante dessus... La destruction de la Nature ne s'arrêtera malheureusement pas avec le confinement. Il faut que les mentalités changent en profondeur. Je suis dans une sourde colère. J'en viens à me demander si ce ne serait pas mieux que COVID gagne la bataille pour que la Nature puisse enfin vivre en paix... Je fais le serment de consacrer le reste de ma vie à protéger la biodiversité sur Terre. J'essaie de bénir mes voisins. Pas facile...
Je ne résiste plus, je m'adapte
- Lundi matin : Deux des cinq participants à ma formation Google acceptent de migrer vers un coaching individuel. Tout se passe si bien que je reçois des messages enthousiastes après la séance. Merci infiniment à vous, Cathy et Sabine !
- Lundi après-midi : Tous les clients qui ont pris rendez-vous avant la crise acceptent de passer en vidéoconférence.
- Mardi matin : Deux rendez-vous Zoom s'enchainent le matin, un coaching blog puis une refonte de site.
- Mardi après-midi : Je décide limiter la consultance aux matinées, c'est suffisant pour moi. L'après-midi, je réponds à mes mails, je prépare mes réunions, puis je vais prendre l'air au potager ou marcher autour de chez moi.
- Mercredi matin : Je réalise que le service que j'ai "inventé" lundi pour remplacer la formation est parfaitement adapté à la crise actuelle. Je développe une nouvelle offre "Audit de site à distance" et publie l'info sur mon site.
- Mercredi après-midi : Je prends congé comme chaque mercredi mais je reste chez moi. Mes excursions hebdomadaires avec ma fille Florine me manquent. L'art et la découverte sont indispensables à mon équilibre. Je me console en regardant mon blog.
- Jeudi : Deux sites "à quatre mains" terminés et lancés dans la journée pour des femmes qui changent le monde. Une très chouette psychologue le matin et de merveilleuses sages-femmes l'après-midi. Je suis crevée mais fière de moi.
- Vendredi : Deux heures de coaching MailChimp, la cliente a pris rendez-vous hier soir. C'est génial.
- Vendredi soir : Mon site est modifié en profondeur pour s'adapter au travail "en confinement".
Oui, l'optimisme est permis !
- Ce lundi 30 mars, je fais le bilan de mon mois de mars. La première quinzaine étant excellente, je pensais avoir juste limité la casse. J'ouvre de grands yeux après avoir encodé ma dernière facture, mon résultat mensuel est excellent. J'ose le dire, il est nettement meilleur que janvier et février...
- Mon agenda est rempli pour la semaine prochaine. J'accepte de bonne grâce les annulations. Du coup, pour chaque annulation, j'ai trois nouveaux clients.
- Je n'ai plus peur des impayés : je me fais aider par Yasmina, secrétaire free-lance, qui appelle les retardataires avec douceur et persuasion. Elle me soutient bien plus qu'elle ne l'imagine. En fait, elle fait partie intégrante de l'équipe d'Amaranthe.
- Jeudi, je donnerai ma première formation en ligne et je suis confiante. On a même prévu une "pause-café virtuelle" d'une demi-heure avant de commencer, histoire de tester nos micros et de faire connaissance. La formation à distance pourrait bien être aussi conviviale que celle en présentiel. L'histoire nous le dira...
Désormais, je m'autorise à voir cette crise comme une incroyable aventure, où tout est à réinventer. Je sais que le monde ne sera plus jamais comme avant. J'accepte les embûches qui viendront en travers de mon chemin. Mais mon expérience de pèlerine et le vécu de ces deux premières semaines de confinement m'ont appris à faire confiance en tout ce qui arrivera, sans chercher à résister.
L'optimisme et la bienveillance sont mes meilleurs alliés, je ferai tout pour les cultiver et les partager.